La saison cyclonique 2021
Comme à l’accoutumé, l’équipe du professeur Philip Klotzbach de l’Université du Colorado a présenté sa prévision pour la saison cyclonique 2021 au début du mois d’avril, soit 2 mois avant le début officiel de la saison. Cette prévision sera remise à jour début juin, soit au début de la saison cyclonique et début août soit juste au début de la période la plus active de la saison.
Prév avril 2024 | Prév juin 2024 | Prev juillet 2024 | Prev août 2024 | évol. | Moy | 2023 | 2022 | 2021 | |
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Nb de tempêtes nommées | 23 | 23 | 25 | 23 | +9% | 14.4 | 20 | 14 | 21 |
Nb de jours de tempête | 115 | 115 | 120 | 120 | +4,5% | 69.4 | 99 | 56.25 | 78 |
Nb d'ouragans | 11 | 11 | 12 | 12 | +9% | 7.2 | 7 | 8 | 7 |
Nb de jours d'ouragans | 45 | 45 | 50 | 50 | +11% | 27 | 31 | 21.25 | 27.5 |
Nb d'ouragans majeurs | 5 | 5 | 6 | 6 | +20% | 3.2 | 3 | 2 | 4 |
Nb de jours d'ouragans majeurs | 13 | 13 | 16 | 16 | +6% | 7.4 | 7.75 | 5.75 | 13.5 |
Energie cumulée (ACE) | 210 | 210 | 230 | 230 | +9,5% | 123 | 146 | 95 | 145 |
Comme on peut le voir sur le tableau ci-dessus, la saison cyclonique 2021 en Atlantique est prévue plus active que la moyenne 1991-2020 de 10% à 20% sauf pour le nombre de jours de tempêtes ou d’ouragans ou cette activité est prévue plus de 30% supérieure à la moyenne. Dans cette lecture de la prévision, il faut tenir compte de l’évolution de la période de référence qui est passée cette année de 1981-2010 à 1991-2020 avec une augmentation de 15% à 20% de l’activité moyenne sur la période. Cela a pour effet de diminuer la différence de l’activité prévue par rapport à la période de référence.
La prévision cyclonique 2021 en détail
Globalement nous avons vu que l’activité de la saison à venir est supérieur de 10% à 20% par rapport à la moyenne de ces 30 dernières années, maintenant nous allons détailler chaque critère de cette prévision.
- Le nombre de tempêtes nommées : il s’agit de tous les systèmes qui seront nommés par le NHC lors de leur renforcement. Les dépressions tropicales et les ondes n’en font pas partie. La moyenne de ces 30 dernière années est de 14.4 pour 17 cette saison ce qui donne une activité supérieure de l’ordre de 18%. Mais attention parce que ces 30 dernières années ont connu les 2 saisons les plus actives de l’histoire (2005 et 2020) avec respectivement 28 et 30 tempêtes, ce qui a largement gonflé la moyenne. On peut donc estimer que la prévision est bien plus active qu’une année moyenne (hors les 2 années exceptionnelles) et plutôt proche de 25%
- Le Nombre de jours de tempêtes nommées : Il s’agit du nombre de jours où une tempête sera en activité avec un statut de tempête ou supérieur. La prévision d’activité est très élevée par rapport à la moyenne avec 80 jours. Cela veut dire qu’il devrait y avoir au moins un système cyclonique nommé pendant près de 3 mois, soit la moitié de la saison.
- Le nombre d’ouragans : Les ouragans sont des tempêtes dont la vitesse du vent dépasse les 63 kts (119 km/h). Le nombre d’ouragans prévu est de 8 pour une moyenne à 7.2. Même si le pourcentage d’évolution est élevé (11%) le faible nombre rend la différence peu marquée.
- Le nombre de jours d’ouragans : Comme pour les tempêtes, le nombre de jours d’ouragans est prévu très élevé par rapport à la moyenne avec 35 pour 27. Plus d’un mois avec au moins 1 ouragan en cours sur le bassin, c’est une pression important sur la population.
- Le nombre d’ouragans majeurs : Les ouragans majeurs sont ceux de catégorie 3 à 5 soit plus de 96 kts de vent (178 km/h). La prévision est de 4 pour 3.2 en moyenne ce qui ne change pas fondamentalement le risque de destruction que génère ces systèmes.
- Le nombre de jours d’ouragans majeurs : Avec 9 jours pour 7.4 en moyenne, cette donnée est en hausse plus faible que les autres prévisions de journées (tempêtes ou ouragans). Mais c’est plus d’une journée supplémentaire pour un système destructeur et ça peut avoir des conséquence désastreuses.
- L’indice cumulé ACE : c’est un calcul qui permet de déterminer globalement l’intensité destructrice d’un système cyclonique ou d’une saison cyclonique. Il est déterminé en fonction de la vitesse du vent toutes les 6h. C’est la somme des vitesses (en kts) de vent au carré estimées toutes les 6h. Pour des raison de compréhension ce chiffre est divisé par 10.000 pour le rendre compréhensible. L’indice ACE est prévu bien plus élevé que la moyenne.
L’activité de cette saison 2021 est donc prévue significativement à la hausse par rapport aux 30 dernières années. On note cependant que cette hausse concerne plus le nombre de jours d’activité cyclonique que le nombre de systèmes lui même. En résumé c’est un peu plus de systèmes cycloniques mais qui auront une durée de vie bien plus longue (de 20 à 30% en moyenne). On peut aussi imaginer que la sous-estimation prévisionnelle importante de la saison dernière a un peu poussé à prendre la marge haute de la prévision de cette saison.
Mais malgré le fait que la saison 2021 soit prévue plus active que la moyenne de ces 30 dernières années, elle devrait être largement mois active que la saison 2020.
Sur quoi se base la prévision cyclonique
Faire une prévision pour la totalité de la saison 2 mois avant son début est un exercice périlleux. On est sur une période trop courte pour que les modèles climatiques puissent être pertinents et trop longue pour que les modèles météo puisse tourner.
La prévision se base donc sur un modèle développé spécifiquement pour cet exercice mais aussi sur des données statistiques. Globalement, entre 2010 et 2019 cette prévision a été assez pertinente même si elle est passé à côté de l’indice ACE cumulé en 2017 avec les 2 monstres Irma et Maria qui ont totalement faussé les statistiques. Par contre en 2020, cette prévision de l’Université du Colorado du mois d’avril est totalement passée à côté en sous-estimant la prévision de plus de 50%. C’est une première depuis que des chercheurs (notamment le Dr Gray) ont commencé ce genre de travaux. La question est maintenant de savoir si la saison exceptionnelle 2020 sera un artefact statistique comme l’a été celle de 2005 ou si elle ouvre la voie à des saison de plus en actives pour ces prochaines années/décennies.
Quelle conclusion en tirer pour la saison cyclonique 2021 sur les Antilles ?
Je répète souvent qu’une prévision saisonnière est une donnée comme une autre et qu’elle n’est pas pertinente à l’échelle de petits territoires comme les nôtres dans les Petites Antilles. La saison dernière l’a encore une fois démontré en épargnant totalement l’arc antillais pour une saison qui a pourtant battu beaucoup de records d’activité. Il en a été de même en 2005 et 1967, les autres saisons très actives depuis 1950.
La prévision saisonnière ou la statistique d’une saison ne sont que des données scientifiques globales assez décorrélées de ce que nous vivons au quotidien sur nos îles. Ce sont uniquement des tendances globales. Si vous prenez le seul ouragan catégorie 3 de la saison sur votre maison, vous trouverez que la saison a été très active et violente même si globalement cela n’a pas été le cas. De la même manière, même si la saison a battu quasiment tous les records d’activité comme en 2020 et que vous n’avez été touché par aucun système ni même dans une trajectoire, votre ressenti sera très éloigné de la réalité statique et prévisionnelle globale.
Il faut donc se préparer, chaque saison et quelle que soit la prévision, comme si nous allions être touchés par un système cyclonique violent. La prévention et la préparation sont les seules solutions qui permettent de vivre plus sereinement une saison cyclonique aux Antilles et limiter au maximum l’impact d’une éventuelle catastrophe.
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